31.10.10

27.10.10

La foire aux insultes

Vincent Marissal, éminent journaliste de Gesca, tient un blogue très édifiant. Toujours à l'affût de la chose politique, ardent défenseur du statisme, il navigue allègrement entre le sarcasme et la condescendance, dès qu'on ose remettre en question l'ampleur de notre gouvernement. Il doit être fier de sa meute de commentateurs; plusieurs sont de solides dialecticiens, qui savent nommer l'ennemi :
Populistes, sans nuance, loosers, ridicules, extrémistes, réactionnaires, caricaturaux, arrogants, individualistes, antagonistes, contradictoires, esprits comptables, complexés, incultes, cupides, maladroits, démagogues, drettistes, lobotomisés, saigneurs, sado-masochistes, inconscients, clowns, rigolos, T-Baggers, égoïstes, absolutistes, arriérés politiques, idiots utiles, dogmatistes de la main invisible, hurluberlus, opportunistes, mononques, matantes, simplistes, radicaux, bêtes, etc.

25.10.10

À propos du conflit au Journal de Montréal

Publiée aujourd'hui, il y a cette lettre d'opinion réclamant que l'État intervienne dans le conflit de travail entre Québecor et les syndiqués du Journal de Montréal. Lecture intéressante. Y a cependant trois points qui me chicotent.

On y déclare que le syndicalisme est un rempart contre les supposés abus de l'entreprise privée envers l'intérêt public. Point de vue réducteur et manichéen, revenant à dire qu'on ne peut être qu'un ange puisqu'on s'oppose au démon. Disons les vrais affaires : un syndicat défend essentiellement l'intérêt de ses syndiqués, et accessoirement l'intérêt général.

On y évoque le triste sort des 253 employés mis en lock-out, sans mentionner combien parmi ceux-ci sont d'authentiques journalistes. Par la même occasion, on évite cette question déplaisante : combien parmi ces syndiqués occupent des emplois que la technologie rend obsolètes (statisticien, préposé aux annonces classées, etc.).

On y affirme aussi que :
La liberté de presse ne doit pas être subordonnée à la liberté d'entreprise.
Qu'est ce que ça implique ? Que la liberté de presse est absolue ? Que la liberté d'entreprise doit y être inféodée ? Sinon quoi ?

11.10.10

Un ange passe

Shuli Egar, un des collaborateurs à l'émission d'Howard Stern sur Sirius, racontait il y a quelques semaines ses mésaventures de voyageur en classe économique. Coincé entre un rabbin Loubavitch obèse et puant des aisselles et la femme de ce dernier, qui ne pouvait prendre l'avion que du côté hublot, le lien Los Angeles-Newark s'annonçait long...

Importuné par l'odeur de l'un et les visites aux toilettes de l'autre, Egar focalise tant bien que mal son attention sur un film. Puis les pieds d'un poupon apparaissent dans son champs de vision. Le rabbin lui tend la progéniture d'un collègue, l'intimant de passer le petit à la geignarde au hublot. Egar se renfrogne et proteste d'être ainsi mêlé à leurs palabres familiaux. Le rabbin, choqué, siffle à sa femme dans la langue du peuple élu : Voilà pourquoi je les déteste!

Voyez-vous, Shuli Egar est un américain d'origine israélienne. Éduqué dans un kibboutz. Pas sémite d'apparence, plutôt méditerranéen, on pourrait lui attribuer vingt nationalités. Calmement, comme pour savourer un moment qu'il attendait depuis toujours, il répond au rabbin une tirade dans un hébreu châtié. En bref, il lui dit d'aller enculer sa mère. Le couple est médusé, embarrassé et silencieux le reste du voyage.

Cet entêtement à se distinguer d'autrui, tant par les usages que les accoutrements. Ce sentiment hautain de supériorité morale, voire ontologique. Qui les mènent à vivre en vase clos, sans sollicitude pour les autres, les goyim. La recette parfaite pour être persécuté jusqu'à la fin des temps.

7.10.10

Sur le thème de la guerre

Dans son excellent blogue, Joseph Siroka souligne la sortie d'une version rehaussée du chef d'oeuvre de Terrence Malick.



Siroka rend un bel hommage. Pour ma part, je pense que la guerre demeure le thème central du film. Exprimée sous ses divers aspects et illustrée dans ses conséquences, que nous révèle la guerre, phénomène radical entre tous, sur l'existence? Je ne crois pas que Malick ait tenté de répondre à cette question. Il propose plutôt une interprétation.

Sages ou folles, il y a aussi ces affirmations du juge Holden, sentences qui me hantent depuis ma lecture de Blood Meridian :

This is the nature of war, whose stake is at once the game and the authority and the justification. Seen so, war is the truest form of divination. It is the testing of one’s will and the will of another within that larger will which because it binds them is therefore forced to select. War is the ultimate game because war is at last a forcing of the unity of existence. War is god.

Brown studied the Judge. You’re crazy Holden. Crazy at last.

The judge smiled.

Might does not make right, said Irving. The man that wins in some combat is not vindicated morally.

Moral law is an invention of mankind for the disenfranchisement of the powerful in favor of the weak. Historical law subverts it at every turn. A moral view can never be proven right or wrong by any ultimate test. A man falling dead in a duel is not thought thereby to be proven in error as to his views. His very involvement in such a trial gives evidence of a new and broader view. The willingness of the principals to forgo further argument as the triviality which it in fact is and to petition directly the chambers of the historical absolute clearly indicates of how little moment are the opinions and of what great moment the divergences thereof. For the argument is indeed trivial, but not so the separate wills thereby made manifest. Man’s vanity may well approach the infinite in capacity but his knowledge remains imperfect and howevermuch he comes to value his judgements ultimately he must submit them before a higher court. Here there can be no special pleading. Here are considerations of equity and rectitude and moral right rendered void and without warrant and here are the views of the litigants despised. Decisions of life and death, of what shall be and what shall not, beggar all question of right. In elections of these magnitudes are all lesser ones subsumed, moral, spiritual, natural.

The judge searched out the circle for disputants. But what says the priest? he said.

Tobin looked up. The priest does not say.

The priest does not say, said the judge. Nihil decit. But the priest has said. For the priest has put by the robes of his craft and taken up the tools of that higher calling which all men honor. The priest also would be no godserver but a god himself.

Tobin shook his head. You’ve a blasphemous tongue, Holden. And in truth, I was never a priest but only a novitiate to the order.

Journeyman priest or apprentice priest, said the judge. Men of god and men of war have strange affinities.

I’ll not secondsay you in your notions, said Tobin. Dont ask it.

Ah Priest, said the judge. What could I ask of you that you’ve not already given?