25.7.09

Lectures récentes


De Pedro Juan Gutiérrez, Trilogie sale de La Havane, trad. Bernard Cohen. On a tous besoin d'une dose de réalisme cru de temps en temps. Aussi obsédé que Miller. Moins comique que Bukowski. Bien qu'on perd vite son sens de l'humour quand on a faim pour vrai. Un excellent chroniqueur.

De Bernal Díaz del Castillo, Histoire véridique de la conquête de la Nouvelle-Espagne, trad. Denis Jourdanet. L'hallucinante épopée des conquistadors au Mexique, racontée par un des soldats de Cortés. Un témoignage historique bouleversant.

De Neil Strauss et les membres du groupe Mötley Crüe, The Dirt: Confessions of the World's Most Notorious Rock Band. Bien écris, souvent hilarant et parfois touchant - comme l'amour qu'un père peut porter à sa fille, vous devrez le lire pour comprendre. Dans le genre (auto)biographique, une réussite.

19.7.09

L'audace d'une espérance ouverte sur l'infini

(...) Nous sommes mesurés à la vérité mais nous ne réussissons pas à dire ce que compte son exigence. Nous sommes dans la clarté mais en même temps dans l'énigme. La raison porte en elle une norme, un vu imprescriptible d'unité et de transparence, mais elle ne semble pouvoir ni se totaliser ni s'expliciter pleinement.

Elle est assez lucide cependant pour reconnaître en elle cette limitation. La limite ne nous apparaît que sur le fond de l'illimité. C'est pourquoi nous devons la percevoir non pas comme un terme qui marquerait la fin d'un parcours, mais bien plutôt comme la trace d'une finitude qui porte en elle à la fois l'aveu de son impuissance et l'audace d'une espérance ouverte sur l'infini.

Jean Ladrière, L'articulation du sens

18.7.09

Armstrong, Collins, Aldrin et compagnie


Il y a encore beaucoup de tracas domestiques à régler ici-bas, tous reliés au phénomène de rareté.

Un jour la page sera tournée et l'humain pourra réaliser sa destinée, là-haut vers les étoiles.

Parce qu'ici n'est pas notre demeure.

12.7.09

Ludwig Wittgenstein, Tractatus logico-philosophicus (version condensée)


1 Le monde est tout ce qui est le cas.

1.1 Le monde est la totalité des faits, pas des choses.

1.2 Le monde se divise en faits.

2 Ce qui est le cas, le fait, est l'existence d'états de choses.

2.04 La totalité des états de choses existants est le monde.

2.06 L'existence des états de choses et leur non existence est la réalité. (L'existence des états de choses et leur non existence nous les nommons respectivement aussi fait positif et fait négatif.)

2.12 Une image est un modèle de la réalité.

2.141 Une image est un fait.

2.172 Une image ne peut représenter sa forme; elle la montre.

2.19 Les images logiques peuvent représenter le monde.

2.223 Afin de déterminer si une image est vraie ou fausse, nous devons la comparer à la réalité.

2.224 Il est impossible de dire qu'une image est en elle-même vraie ou fausse.

3 L'image logique des faits est la pensée.

3.01 La totalité des pensées vraies est une image du monde.

3.1 Dans une proposition, la pensée exprime ce qui peut être perçu par la sensibilité.

3.3 Seules les propositions ont un sens; un nom a un sens uniquement dans le contexte d'une proposition.

3.332 Aucune proposition ne peut affirmer quelque chose sur elle-même, puisqu'aucun signe propositionnel ne peut être contenu en lui-même (voilà l'essentiel de la 'théorie des types').

4 La pensée est la proposition pourvue de sens.

4.001 La totalité des propositions est le langage.

4.003 La plupart des propositions et questions des oeuvres philosophiques ne sont pas fausses mais dépourvues de sens. En conséquence, on ne peut y répondre. On peut seulement dire qu'elles sont insignifiantes. La majorité de ces propositions et questions dérivent d'une incompréhension de la logique du langage. (Comme la question de savoir si le bien est identique au beau.) Et il n'est pas étonnant que, dans les faits, les plus profonds problèmes n'en sont pas.

4.0031 Toute philosophie est une 'critique du langage' (...) la forme logique d'une proposition peut n'être qu'apparente.

4.11 La totalité des propositions vraies sont l'ensemble de la science naturelle.

4.21 La proposition la plus simple, la proposition élémentaire, affirme l'existence d'un état de choses.

4.461 Les propositions montrent ce qu'elles disent; les tautologies et les contradictions montrent qu'elles ne disent rien. (...)

4.464 La tautologie d'une vérité est certaine, celle d'une proposition est possible, celle d'une contradiction est impossible.

5 La proposition est une proposition de vérité des propositions élémentaires.

5.6 Les limites de mon langage signifient les limites de mon monde.

5.61 La logique remplit le monde: les frontières du monde sont ses limites. (...)

5.621 Le monde et la vie sont un.

5.63 Je suis mon monde (Le microcosme).

6 La forme générale de la fonction de vérité est : [p, ξ, N(ξ)]. C'est la forme générale de la proposition.

6.13 La logique n'est pas une doctrine, mais une image miroir du monde. La logique est transcendentale.

6.2 Les mathématiques sont une méthode logique. Les propositions des mathématiques sont des équations, et par conséquent des pseudo-propositions.

6.21 Aucune proposition mathématique n'exprime une pensée.

6.41 Le sens du monde doit se situer en dehors du monde. Dans le monde tout est comme il est, tout se passe comme cela arrive: on n'y trouve aucune valeur - et si celle-ci existait, elle serait sans valeur. S'il y a une valeur qui a une valeur, s'il y a un sens, il doit se situer en dehors de la sphère de ce qui se passe et est le cas. Parce que tout ce qui se passe et est le cas est accidentel. Ce qui le rend non-accidentel ne peut se situer dans le monde; il deviendrait alors accidentel en lui-même. Il doit se situer en dehors du monde.

6.431 Comme avec la mort le monde ne s'altère pas, mais atteint une fin.

6.4311 La mort n'est pas un événement de la vie: nous ne vivons pas pour expérimenter la mort. Si l'on entend par éternité non la durée infinie mais l'intemporalité, alors la vie éternelle appartient à ceux qui vivent dans le présent. Notre vie est aussi sans fin que notre champs de vision est sans limite.

6.44 Ce n'est pas comment le monde est qui soit mystique, mais qu'il existe.

6.54 Celui qui comprend mes propositions reconnaît qu'elle sont vides de sens. Comme qui, surmontant un obstacle après avoir grimpé un par un les barreaux d'une échelle, se débarrasse ensuite de celle-ci. Il aura alors une vue juste du monde.

7 Ce dont on ne peut parler, il faut le taire.

6.7.09

Un suprême praticien parle de son art

War is so complex it’s beyond the ability of the human mind to comprehend (...)

Robert S. McNamara

Source. Le documentaire sur le personnage, The Fog of War, est très instructif.

Si complexe que ça? Oui et non. Quand les justifications et les explications ne suffisent pas, reste les illustrations. Certaines sont d'une limpidité brutale. Comme cette scène d'anthologie de Kubrick:

4.7.09

2.7.09

Le Clézio égal à lui-même


Un preux chevalier de la littérature française pourfend ces jours-ci la politique énergétique du Québec.

J'ai déjà dit à quel point tous ces environnementaleux, habiles ou pas avec les mots, m'exaspèrent.

Idéalisation d'une nature dans les faits inhospitalière. Louange d'un mode de vie misérable. Et pire, encensement d'une spiritualité foireuse, où une épinette a même valeur qu'un homme.

Un prix Nobel qui se respecte devrait plutôt se soucier des 800 millions de bipèdes sans plumes qui, encore aujourd'hui, ne mangent pas à leur faim.

L'humanisme est la seule cause juste. Le reste, si beau soit-il, n'est qu'instrumental.