2.5.12

Maurice Boulé


Mon goût pour la lecture, mon français somme toute potable, je les dois à un professeur de mon école secondaire. Un authentique Pépère-la-virgule. Pire : un nazi de la grammaire! 

Intense, éloquent, sévère et guindé; l'homme imposait le respect. Imaginez un Paul Léautaud sur la testostérone... Avec lui, aucune fanfaronnade. Chacune de ses classes était un secouage de pommier en règle.

Il usait envers nous d'un savant mélange de pédagogie et de raillerie. Critiquant devant tous la dissertation amphigourique de l'un ou le galimatias de la composition de l'autre. Aux yeux de ce juge impitoyable, nos travaux se résumaient souvent en fadaises et charabias. Nous qui ne connaissions pas ces termes, simplement par son ton théâtral sans appel, nous en comprenions la signification!

Il citait Boileau et de La Fontaine, s'extasiait sur Molière. Nous, les jeunes cons, étions soufflés par son érudition, la richesse de son vocabulaire, sa méthode rigoureuse. Il nous fusillait d'invectives du genre Monsieur Salvas, c'est Verlaine que vous récitez, pas le raisonnement d'un chimpanzé! ou Monsieur Savary, votre résumé de Vol de nuit est un pur salmigondis! Il nous exhortait à potasser sans relâche Larousse, Bescherelles et Grévisse. 

Blessés dans notre amour propre et les oreilles dans le crin, nous apprenions plus que le français. Maurice Boulé nous introduisait à la culture littéraire et au souçi de clarté dans l'expression de notre pensée.