26.11.08

La traversée des apparences

Pierre est un entrepreneur peintre. Lui et sa blonde se construisent une maison. Ils ont donc besoin d'outils. Ça tombe bien, mon métier est d'en louer. Pierre me semble un chic type. On va faire de la business ensemble.

Tout au long, notre relation est cordiale. Pas de pépins, services rendus, chèques encaissés, etc. Mon impression devient une opinion; Pierre est un gars travaillant, dégourdi et affable.

Au terme de son projet, il me retourne des échafauds. Je suis dans ma cour et lui donne un coup de main pour décharger le matériel. Nous discutons de la pluie et du beau temps. Et puis, ça glisse...

- Le décompte paraît bon. Je retourne au comptoir aller voir.
- Je te fais confiance, Alain. S'il manque un madrier, tu sais où me trouver. Mais si je pouvais te prendre un million, mon homme, tu risquerais pas de me revoir...

Je feins d'ignorer sa remarque. J'observe son tatouage de mauvais goût sur l'avant-bras. Un tout nouveau Pierre. Il enchaîne :

- Y a rien que j'haïs plus que quelqu'un qui veut me voler. Y a un de mes anciens employés; je suis sûr que cet enfant de chienne m'a volé de la peinture! De la peinture crisse! Braquer une banque, ok, mais des gallons de peinture? Câlisse!

Pierre s'emporte :

- L'avoir pris sur le fait, je l'aurais battu comme ils font en Asie, avec une baguette de bambou fendue! La peau pincée s'arrache en lambeaux à chaque coup! Ça peut pas faire plus mal!

Je vois maintenant le vrai Pierre : un chic type, bien que sociopathe et probablement sadique.