J'avais besoin d'un livreur d'équipements. C'est mon associé qui l'a engagé. Son nom est Joe. Début trentaine. Du genre calme, peu bavard mais toujours en contact par le regard. Franc et simple. Dévoué et débrouillard. Mon associé est un bon recruteur. Meilleur que moi en tout cas.
Auparavant, Joe travaillait dans le transport adapté. Handicapés, malades et accidentés divers. Ça va du diabétique amputé des deux jambes au psychotique sous sédation. Tous ceux dont les taxis et ambulanciers ne peuvent s'occuper. La liste est longue.
Joe m'a déclaré qu'il pouvait détecter sans mal un suicidaire. Il en a vu plusieurs.
Joe m'a déclaré qu'à l'exception des malades dans la tête, tous ceux dont il avait la responsabilité, même les moribonds, éprouvaient le désir de vivre.
J'ai essayé de me figurer la force morale requise par un tel métier. Je me suis senti petit.
